Julie Blanc – Composer avec les technologies du web

Introduction

Introduction

Introduction

Les 20 et 21 octobre 2017 à la Gaîté Lyrique à Paris, se tient un salon de l’édition libre et alternative où les participant·e·s présentent des productions et ouvrages imprimés réalisés avec les technologies du web et/ou des outils expérimentaux (génératifs, collaboratifs, libres et open source). Le salon est organisé par le collectif informel PrePostPrint1, initié par l’artiste et designer Raphaël Bastide et la designer graphique Sarah Garcin quelques mois plus tôt. La présentation de l’évènement rend compte de ce qui anime ce groupe de participant·e·s :

Nous souhaitons nous passer des logiciels classiques de mise en page et d’édition pour nous tourner vers des technologies plus accessibles et conviviales, pouvant évoluer et s’adapter à chaque projet. La programmation devient un outil de design et permet de réinventer sans cesse le processus de création éditoriale, questionnant les formats et les formes de publications.2

Le 9 janvier 2018, dans les bureaux de MIT Press à Cambridge aux États-unis, se réunissent un ensemble d’acteur·rice·s du monde de l’édition et du web intéressé·e·s par l’utilisation des technologies du web pour l’impression et la mise en page automatisée. L’évènement, à l’initiative d’Adam Hyde, co-fondateur de la Collaborative Knowledge Foundation (Coko), a pour but de partager les diverses expériences des personnes présentes3. Il marque surtout le départ d’une initiative collaborative pour le développement d’une approche technique libre et open source basée sur les standards du web écrits par le World Wide Web Consortium (W3C). Quelques semaines plus tard, le 23 mars 20184 est publiée une première version de Paged.js, une librairie JavaScript libre et open-source qui permet l’export de PDF et l’affichage paginé dans le(s) navigateur(s) à partir des technologies du web.

Du 28 au 30 novembre de la même année, trois workshops consécutifs « Paged Media × PrePostPrint » sont organisés à Bruxelles (dans les locaux d’Open Source Publishing) et à Paris (à l’École nationale supérieure des Arts Décoratifs) par Julien Taquet, Fred Chasen et moi-même5. Adressés à des professionnel·le·s de différents horizons (éditeur·rice·s, designers, rédacteur·rice·s, développeur·euse·s, etc.), ces workshops avaient pour but de présenter Paged.js et d’explorer les potentiels de l’impression avec les technologies du web. Les résultats des expérimentations menées pendant ces quelques jours sont divers : des participant·e·s ont cherché à intégrer l’outil dans leurs flux de travail existants, des éditeur·trie·s ont créé des feuilles de styles destinées à leurs collections de livres et des designers graphiques et artistes ont expérimentés l’hybridation de certaines fonctionnalités du web avec l’impression (polices de caractères variables, dégradés, rotation, gif, etc.).

Parallèlement, dans les derniers mois de l’année 2018 et les premiers mois de l’année 2019, Antoine Fauchié et moi-même travaillons avec l’équipe du musée Saint Raymond de Toulouse à la conception et au développement d’une publication multisupport composée d’un catalogue imprimé et d’un catalogue numérique (sous forme de site web). La chaîne de publication de cette double publication repose sur l’utilisation d’outils open source et collaboratifs et particulièrement sur les technologies du web et ses standards – à la fois pour l’écriture, l’édition, la composition et la diffusion des catalogues6. Ainsi, la version imprimée du catalogue, issue des mêmes contenus que ceux du site web, est la première publication imprimée en offset composée et mise en page avec Paged.js.

Ces quelques évènements survenus juste avant que ne débute ce travail de recherche doctorale et dont nous avons fait l’expérience illustrent à divers degrés le développement de nouvelles pratiques dans le domaine du design graphique : l’utilisation des technologies du web pour la conception, la composition et la mise en page d’ouvrages et de documents imprimés7.

Contexte de la recherche :
les technologies du web pour l’impression

L’une de ces technologies, les feuilles de style en cascade, appelées CSS (de l’anglais Cascading Style Sheets), sont au cœur de ces pratiques. CSS est un langage informatique descriptif permettant de coder la mise en forme de documents structurés sur le web. Dès son invention, le langage permet d’adapter la mise en forme des documents à une multitude de périphériques de sorties (écran comme imprimé) mais ses possibilités de mise en page pour les sorties imprimées ont longtemps été ignorées par les designers graphiques, notamment parce que le langage ne proposait alors pas assez de fonctionnalités pour permettre des mises en page élaborées.

Or, depuis une dizaine d’années, l’utilisation du code dans les pratiques du design graphique, et particulièrement dans le web et l’impression, fait l’objet d’un intérêt toujours plus grand8. Les processus de programmation offriraient en effet des possibilités inédites d’articulation de différents médias, de génération de formes créatives et d’expérimentations graphiques et performatives diverses. Mais c’est particulièrement auprès d’une petite communauté de designers graphiques concernés par la relation à leurs outils et leurs valeurs culturelles intrinsèques que l’utilisation des technologies du web pour l’impression trouve un fort écho9. Ces designers graphiques – situés majoritairement en France, en Belgique et aux Pays-Bas – adoptent en effet ces technologies pour s’inscrire dans une lutte contre le monopole du logiciel à interface graphique Adobe InDesign, outil hégémonique dans la profession pour la conception de documents imprimés, mais posant des problèmes sociétaux et éthiques.

Les problèmes posés par Adobe InDesign

Adobe InDesign est un logiciel de Publication Assistée par Ordinateur (PAO) permettant de concevoir et de mettre en page divers supports destinés à l’impression. Depuis 2012, l’accès au logiciel fonctionne par
un abonnement mensuel ou annuel et des mises à jours fréquentes via un compte Creative Cloud nécessitant un accès par un réseau Internet.

Le premier problème que pose le logiciel est d’ordre politique puisque le modèle d’abonnement pose la question de la propriété des outils de travail des designers, comme l’exprime le designer graphique Nicolas Taffin :

Le pêché mortel des designers graphiques pourrait bien être cette ignorance, qui les mène doucement sur la voie de la prolétarisation. Car c’est le moment ou l’outil n’est plus la propriété de l’artisan qu’il devient ouvrier. Et le réseau opère la machinisation complète et définitive de l’outil graphique.10

Les designers graphiques sont ainsi rendus dépendants d’une entreprise privée (américaine) avec ses propres logiques commerciales et toutes les problématiques que cela pose. En 2019, au Venezuela, l’accès au logiciel est temporairement coupé dans tout le pays suite à une rupture d’accord commercial avec les États-Unis. En 2022, c’est l’utilisation de la bibliothèque de couleurs Pantone (sous licence propriétaire) qui est rendue payante dans le logiciel suite à un différent commercial entre les deux entreprises.

Par ailleurs, les très récentes mises à jour du logiciel n’échappent pas à deux controverses vivement débattues aujourd’hui : celle de l’utilisation des données personnelles sans consentement et celle de l’intelligence artificielle. Adobe embarque en effet une option d’analyse dans tous ses produits, option activée par défaut sans que ses client·e·s n’y consentent préalablement, qui autorise l’entreprise à « analyser les contenus à l’aide de technologies de machine learning telle la reconnaissance de motif ». La firme analyserait ainsi les créations de ses utilisateur·rice·s afin d’entraîner ses modèles d’intelligence artificielle. Or les problématiques que pose l’intelligence artificielle pour les professions dites « créatives », notamment en ce qui concerne la propriété intellectuelle, est aujourd’hui au cœur d’un vif débat11.

Le deuxième problème posé par InDesign est d’ordre économique. La question du coût de l’abonnement n’est pas négligeable pour une profession majoritairement sous statut indépendant. Cette problématique pèse même jusque dans les écoles d’arts et de design qui doivent sans cesse maintenir à jour leur parc de logiciels avec des abonnements et des licences qui pèsent lourdement sur des budgets de plus en plus restreints12.

Enfin, rapportons une autre critique adressée au logiciel exprimée par le chercheur Anthony Masure : son modèle de services basé sur des suites de sélections d’actions via des boutons et des menus réduirait les pratiques créatives à de simples tâches à exécuter dans une visée utilitariste13. Ce modèle entre en contradiction avec l’appétence des designers graphiques à donner du sens à l’utilisation de systèmes techniques par la combinaison d’une réflexion technique et d’une réflexion esthétique instrumentant leurs pratiques.

Quitter Adobe pour des technologies libres

Face à cela, certains designers invitent à quitter l’écosystème de logiciels propriétaires Adobe au profit des technologies libres et standardisées comme en atteste le manifeste « Relearn » d’Open Source Publishing14. Parallèlement, ils·elles militent pour une « culture du code15 » et une « design graphique libre16 » avec une revendication forte de l’éthique du hacker dans le milieu du design graphique17. Les pratiques de code se rapportant à la culture du logiciel libre sont ainsi valorisées par ces designers graphiques travaillant avec la programmation.

Un logiciel libre se définit par la possibilité d’inspecter, modifier et dupliquer son code source. Il implique donc que ce dernier soit accessible, notamment par une licence ouverte. Mais le logiciel libre est aussi une culture, réunissant une communauté de praticien·ne·s et dont les règles reposent sur des principes éthiques et des valeurs telles que la collaboration, le partage, la maîtrise de ses données personnelles et l’apprentissage collectif. En se référant à cette culture à travers l’adoption des technologies du web, les designers graphiques s’inscrivent alors dans une volonté utopique d’autonomie de production, où « la conception nécessairement ouverte et partagée du programme implique un pouvoir non concentré, qui met de fait ‹ au pouvoir › les membres de la communauté18 ». Le partage de code source permet alors de rendre publics les processus et les outils mis en place dans l’élaboration d’un projet et de s’inscrire dans une communauté de pratique partageant les mêmes valeurs.

Adopter les technologies du web

Parallèlement, nous observons depuis quelques années le développement de l’utilisation des technologies du web pour l’impression dans divers projets rattachés à des champs universitaires, militants ou commerciaux.

Nous avons déjà cité l’une de nos productions personnelles entrant dans ce cadre19. Ajoutons à cela, en France, une collection de livres numériques et imprimés publiée chez l’éditeur indépendant C&F éditions20 et la publication par les Presses de SciencesPo du livre Controverses. Mode d’emploi21. Une grande part de ces projets repose par ailleurs sur la mise en place de chaînes de publications collaboratives elles aussi basées sur l’utilisation des technologies du web22. Depuis peu, les éditions du Louvre, accompagné de Julien Taquet, Nicolas Taffin et Agathe Baëz, participent à la fabrication d’une chaîne de publication pour produire et publier des livres avec les technologies du web. Notons aussi un important mouvement lié à la production de divers fanzines.

En Belgique, le magazine Médor, a recours depuis 2015 des outils libres et open source mis en place par Open Source Publishing pour publier une version imprimée entièrement réalisée avec les technologies du web. Aux États-Unis, le Getty Museum de Los Angeles a développé sa propre chaîne de publications pour ses catalogues imprimés et numériques, où la sortie imprimée utilise les technologies du web23. Toujours aux États-Unis, le groupe Hachette Book utilise les technologies du web pour l’impression dans sa chaîne de production depuis 2010 (notons cependant que c’est moyennant l’ajout d’un logiciel propriétaire)24.

Par le même temps, dans les écoles d’art et de design, nous constatons un intérêt grandissant pour l’utilisation des technologies du web pour l’impression comme en témoignent les nombreux workshops donnés en ce sens au cours de ces 5/6 dernières années. Les préoccupations éminemment politiques concernant les dimensions libres et open-source de ces technologies en renforcent l’engouement auprès des étudiant·e·s.

Une appréhension des designers graphiques

Malgré ce contexte, peu de designers graphiques utilisent réellement les technologies du web pour la mise en page imprimée. Elles représentent un champ très spécialisé qui implique des connaissances complémentaires provenant de milieux souvent cloisonnés tant au niveau des formations qu’au niveau des métiers. Les compétences nécessaires concernent en effet autant l’édition structurée, le design graphique que le développement web.

D’autres raisons, rattachées à un certain nombre de peurs propres aux imaginaires du code, entravent l’adoption de celui-ci. La facilité d’utilisation des logiciels à interface graphique est mise en avant face à la supposer difficulté du code. Mais aussi, outre les récents changements que nous avons pointés, le champ du design graphique souffre encore globalement d’une image négative de la programmation et sa supposée incompatibilité avec une pratique considérée pour ses aspects créatifs, plastiques et sensibles. Malgré des contre-exemples liés au mouvement du creative code25, l’idée que le code réduirait le champ de ses possibles plastiques et sensibles reste bien ancrée dans la profession. Notons par ailleurs la peur latente d’une déqualification du métier face à l’illusion d’une possible automatisation de la mise en page rêvée par certain·e·s éditeur·rice·s26.

Enfin, ajoutons à cela que les caractéristiques propres aux technologies du web remettent en jeu un certain nombre de principes ancrés dans la culture du design graphique. Le vieil adage de la mise en relation du fond et de la forme est souvent présenté comme un des aspects primordiaux du design graphique (l’idée que chaque texte appelle une mise en page qui lui soit propre) et paraît illusoirement incompatible avec le principe technique de séparation du fond et de la forme que propose les technologies du web. De même, la notion de fluidité27 apportée par ces nouvelles technologies invite à un mouvement de déprise difficile pour les designers graphiques habitué·e·s à maîtriser les formes qu’ils·elles produisent de bout en bout. C’est donc dans un contexte qui ne fait pas consensus que s’inscrit ce travail de recherche.

Positionnement :
une recherche à visée transformatrice

La mise en page de documents imprimés avec les technologies du web se situe au sein d’enjeux productifs, culturels, sociaux pour le métier du design graphique. Notre travail de recherche s’inscrit donc dans ce contexte et poursuit plusieurs objectifs. Le premier objectif est d’étudier et éclairer ce phénomène en émergence et d’analyser les transformations des pratiques des designers graphiques suite à l’introduction du code. Il s’agit aussi pour nous de faire progresser la connaissance sur la culture du logiciel libre et celle de la programmation web en lien avec le design graphique.

Le deuxième objectif de cette recherche est de défendre et d’œuvrer à l’introduction des technologies du web dans le domaine du design graphique, car elle relève selon nous d’une transformation socio-culturelle positive de la pratique des designers graphiques. En ce sens notre recherche participe à ce qu’Anna Stetsenko nomme « a transformative activist stance », une position militante transformatrice.

What is suggested is a model of science as a nonneutral, transformative activist endeavor that transcends the separation between theory and practice while embracing human agency grounded in political imagination and commitment to social transformation.28

Notre démarche est donc celle d’une praticienne se posant des questions scientifiques à propos du développement de pratiques auxquelles elle participe. Par le même temps, ce travail invite les designers graphiques qui participent à cette communauté de pratique à adopter une position réflexive sur leur activité. Il permet ainsi de mettre en évidence ce qu’ils·elles sont en train d’accomplir et ce que cela signifie vis-à-vis de la place sociale et culturelle de leur métier. En ce sens, ce travail ambitionne de s’engager dans une recherche par et pour la pratique.

Question de recherche / question de design

Par notre ancrage institutionnel ce travail de recherche s’inscrit à la fois en design et en ergonomie. Notre ancrage de praticienne relève quant à lui du design. Pour arbitrer la place de ces deux disciplines dans notre recherche, nous nous appuyons sur la proposition d’Alain Findeli29, celle de séparer question de design et question de recherche – et donc, par la même occasion réponse de design et réponse de recherche – dans les recherches portées par un projet30.

Les deux questions sont intimement liées, mais passer du champ de questionnement du design à celui de la recherche scientifique implique « d’approfondir les configurations qui sont en jeu dans la question de design d’où l’on part »31 en choisissant un cadre conceptuel adéquat selon les circonstances qui se présentent.

Notre intérêt réside dans le développement de la communauté de pratique des designers graphiques associée à l’utilisation des technologies du web pour la conception d’ouvrages imprimés (question de design). Nous inscrivons notre recherche dans le champ des théories de l’activité qui ont développé un outillage théorique et méthodologique qui permet d’appréhender et analyser l’activité déployée dans le contexte de situations spécifiques et inscrites dans un contexte social donné.

En approfondissant les théories de l’activités depuis le champ du design interactif, Victor Kaptelinin et Bonnie A. Nardi ont montré que celles-ci sont une base conceptuelle particulièrement intéressante pour s’intéresser à l’intégration des objets techniques dans la structure de l’activité humaine32. Les auteurs précisent par ailleurs que l’approche instrumentale en est le cadre le plus abouti. C’est pourquoi, ces théories nous semblent particulièrement pertinentes pour éclairer le phénomène de transformation de l’activité des designers graphiques à la suite de l’introduction d’une nouvelle technologie.

Nous mobiliserons en particulier l’approche instrumentale développée par Pierre Rabardel et la théorie historico-culturelle de l’activité portée ces dernières années par les travaux d’Yrgö Engeström. Non seulement ces cadres nous permettront d’éclairer le développement de l’activité dans ses dimensions individuelles et collectives, mais ils nous paraissent aussi particulièrement pertinents vis-à-vis d’une recherche portée par la pratique puisqu’ils mettent tous les deux en jeu une visée transformatrice. L’approche instrumentale en visant l’analyse de l’activité d’une situation donnée dans une perspective de conception et la théorie de l’activité historico-culturelle de l’activité en proposant sa propre démarche d’intervention visant à transformer les situations de travail étudiées directement avec les acteur·rice·s concerné·e·s.

Ces cadres théoriques nous permettront de conceptualiser les pratiques des designers graphiques qui nous intéressent du point de vue de l’activité, en ce sens, nous emploierons le terme « d’activité de composition » pour les désigner. Ils offrent également des outils méthodologiques, tels que l’analyse de l’activité en situation et l’analyse historico-culturelle de l’activité, qui nous permettront de mieux appréhender les transformations et le développement de l’activité des designers graphiques. En particulier, nous utiliserons les notions de genèses instrumentales et d’apprentissage expansif.

Grâce à cet outillage théorique et méthodologique, nous serons alors en mesure de problématiser notre recherche et de répondre aux questions suivantes : Comment les designers graphiques élaborent-ils les instruments de leur activité de composition avec les technologies du web et participent de fait au développement de leur communauté de pratique ? De quelles caractéristiques sont porteurs ces instruments ?

Enfin, ce travail de recherche vise à contribuer aux réflexions en cours dans nos divers ancrages institutionnels. D’une part, elle vise à apporter sa contribution à l’ergonomie développementale portée par les concepts de l’approche instrumentale élaborés depuis plus de vingt ans à l’université Paris 8. L’équipe C3U du laboratoire Paragraphe s’y emploie par ailleurs depuis quelques années à ouvrir ces questions dans le champ de l’art33 et du design34. D’autre part, elle ambitionne de participer à la réflexion entamée depuis quelque année à l’EnsadLab – laboratoire de recherche de l’École nationale supérieure des Arts Décoratifs de Paris – sur les logiques instrumentales à l’œuvre dans le champ de la recherche en art et en design, notamment portées par des recherches basées sur la pratique et visant à produire du commun35.

Structure du manuscrit

Ce manuscrit est organisé en sept chapitres. Le premier chapitre détaille les cadres théoriques utilisés dans ce travail de recherche, c’est-à-dire les théories de l’activité et plus particulièrement l’approche instrumentale et la théorie historico-culturelle de l’activité. Le deuxième chapitre présente un état de l’art divisé en trois parties, respectivement consacrées à l’évolution historico-culturelle de l’activité de composition, une courte histoire du web replacé dans le contexte de la publication et des pratiques du design graphique, et une contextualisation de la culture du logiciel libre et particulièrement des valeurs qui l’encadrent. Le troisième chapitre situe notre recherche en énonçant notre problématique scientifique, notre problématique de design et notre démarche méthodologique générale.

Les quatrième, cinquième et sixième chapitres sont consacrés aux trois études empiriques au centre de ce travail de recherche. La première est basée sur des entretiens semi-directifs avec neuf designers graphiques et a pour but de caractériser l’activité de composition paginée. La deuxième étude a pour objectif d’analyser plus précisément l’activité de composition avec les technologies du web chez deux designers graphiques, en se fondant sur l’observation en situation de cette activité. La troisième étude présente la mise en place et l’analyse d’un hackathon autour de la conception de Paged.js, que nous aurons l’occasion de présenter plus longuement.

Le septième chapitre synthétise ce travail de recherche et développe ses apports. Une discussion croisée des trois études nous permettra par ailleurs de caractériser plus précisément le développement de l’activité de composition avec les technologies du web à travers les notions d’apprentissage expansif et d’activité transitionnelle. Nous y exposerons aussi la communauté de pratique qui s’est développée autour de cette activité de composition spécifique.

Enfin, une conclusion nous permettra de mettre en perspective ce travail de recherche par rapport aux enjeux conceptuels, politiques et esthétiques que les technologies du web pour l’impression ouvrent pour le design graphique.

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